Dans un contexte de lutte accrue contre la délinquance économique et financière, le droit pénal des affaires a connu ces dernières années plusieurs réformes majeures. Cet article se propose d’examiner les principales évolutions législatives qui ont marqué ce domaine, en mettant en lumière les enjeux et les conséquences pour les entreprises et leurs dirigeants.
Renforcement de la législation contre la corruption et le trafic d’influence
La loi Sapin II, adoptée en 2016, constitue l’une des avancées législatives les plus significatives en matière de lutte contre la corruption et le trafic d’influence. Elle impose notamment aux entreprises de plus de 500 salariés et réalisant un chiffre d’affaires supérieur à 100 millions d’euros, la mise en place d’un programme de conformité anticorruption. Ce dispositif doit comprendre un ensemble de mesures visant à prévenir et détecter les risques de corruption, telles qu’un code de conduite, une cartographie des risques, des procédures d’évaluation des tiers ou encore un dispositif d’alerte interne.
Par ailleurs, la loi Sapin II a créé l’Agence française anticorruption (AFA), une autorité administrative indépendante chargée de veiller au respect des dispositifs anticorruption par les entreprises. L’AFA peut réaliser des contrôles et, le cas échéant, infliger des sanctions administratives pouvant aller jusqu’à 1 million d’euros pour les personnes morales et 200 000 euros pour les personnes physiques.
Adoption du dispositif de la convention judiciaire d’intérêt public
Inspirée du modèle anglo-saxon du Deferred Prosecution Agreement (DPA), la convention judiciaire d’intérêt public (CJIP) a été introduite en France par la loi Sapin II. Il s’agit d’un mécanisme de transaction pénale permettant aux entreprises soupçonnées de corruption, trafic d’influence, blanchiment de fraude fiscale ou encore favoritisme, de conclure un accord avec le procureur de la République afin d’éviter un procès public et une condamnation judiciaire. La CJIP prévoit généralement le paiement d’une amende, la mise en place d’un programme de conformité sous contrôle de l’AFA et, le cas échéant, l’indemnisation des victimes.
Ce dispositif présente plusieurs avantages pour les entreprises concernées, notamment une résolution plus rapide et moins coûteuse des litiges ainsi qu’une limitation des conséquences sur leur réputation. Depuis son introduction en 2016, plusieurs entreprises françaises et internationales ont conclu des CJIP avec les autorités françaises, représentant des montants totaux d’amendes considérables.
Renforcement de la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme
Le cadre législatif français en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme a également évolué ces dernières années, notamment avec l’adoption de la cinquième directive européenne en la matière. Cette directive, transposée en droit français par une ordonnance de 2020, renforce les obligations des entreprises en matière de vigilance à l’égard de leurs clients et partenaires, ainsi que les pouvoirs des autorités compétentes pour sanctionner les manquements.
Les entreprises concernées sont tenues de mettre en place un dispositif de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme, comprenant notamment l’établissement d’une cartographie des risques, la réalisation d’une analyse approfondie des clients présentant un risque élevé et la désignation d’un responsable chargé d’assurer la conformité du dispositif aux exigences légales.
Ces réformes récentes en matière de droit pénal des affaires témoignent de l’accroissement des contraintes réglementaires pesant sur les entreprises et leurs dirigeants. Il est donc essentiel pour ces derniers de se tenir informés des évolutions législatives et de mettre en place les mesures nécessaires pour prévenir les risques pénaux auxquels ils peuvent être exposés.
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